Il y un endroit en France qui regarde loin par-delà une plaine martelée, labourée, creusée, dévastée.
Et s’ils revenaient…
Capote et paquetage, fusils, casques d’aviateur, hache, les spahis et les artilleurs, les imberbes et les poilus, chaque arme est là. Harnachés et nus. Débout mais les yeux vides. Les yeux morts de ceux qui ont trop vu, ce que sont ces vivants-morts de la Première Guerre mondiale. Une plaie sanguinolente et mémorielle qui bée dans la plaine picarde.
Des croix noires et des croix blanches, on le sait trop peu. Les cimetières gardés et manucurés de ceux qui glorifient leurs morts sous la bannière étoilée, et les discrets jardins du souvenir de ceux qui pleurent avant tout la guerre.
Il faut aller arpenter cette terre, ses tranchées et garder les yeux ouverts devant les peintures et dessins et gravures de ceux qui ont fait passer ce temps qui n’en finissait plus de s’étirer, le temps d’une guerre qui dévorait mille et un homme de chaque côté chaque jour, d’une guerre qui n’a dit son horreur que trop récemment. Une guerre qui a laissé deux pays exsangues.
La Grande Guerre, oui. Celle qui porte ses majuscules et son épithète comme autant de cicatrices.
La France devant eux.
Fatiguée, inquiète, exsangue elle aussi. Un bouclier à la main, elle guette. Face à l’Est. Elle pense protéger ceux qui ne sont plus que des Fantômes pour que leurs fils ne suivent pas leurs pas.
On est en 1935.
Note : « Les Fantômes », inauguré en 1935, a été sculpté par Paul Landowski sur la Butte Chalmont en Picardie. Il est également l’auteur du Christ rédempteur du Corcovado de Rio de Janeiro…
Tu as trouvé de beau mots
++
@ Matth'Bou' : merci beaucoup 🙂
Un très bel hommage ! par le texte comme par les photos !
Cette sculpture est majestueuse, à la fois paisible et angoissante, elle dégage à la fois la mort et la vie, la sérénité et le cauchemar, ils sont éternellement figés... vivants !
@ M1 : merci... 🙂
Oui, tu as raison, il y a quelque chose de la sortie du cauchemar, où l'on se sent rassuré mais où l'angoisse perdure...