Après ces vadrouilles en Croatie et Slovénie, je trouvais qu’il y avait quelque chose de louche dans les Balkans : on respire là un air trop doux et trop vivifiant à la fois ; la mosaïque qui se déroule sous mes pas y est trop inouïe, alphabets et religions, ethnies et cultures ; et la splendeur des côtes découpées plongeant dans l’azur méditerranéen et les forêts sombres qui gravissent les sommets à pic sont bien trop belles… Je devais explorer plus avant : Balkans, à nous deux !!! Un sac à dos rempli, un guide dans la poche, mes lunettes de soleil et mes sandales, une de mes camarades de jeu favorite sous le bras et en vue, la Croatie, la Serbie, la Bosnie, le Monténégro et l’Albanie. Rien que ça, oui…
Mais les grands voyages sont faits de petites étapes : il nous fallait d’abord quitter la Croatie. Malgré les bus aux horaires et prix étudiés pour te faire dépenser le plus possible, je parvins à laisser derrière moi les hordes de touristes venus passer la journée à Dubrovnik avant de remontrer sur les bateaux de croisière, pour me plonger dans le cyrillique et les routes en lacets. La côte dalmate virevolte sous mes yeux, une église à chaque virage, des villages aux toits rouges de loin en loin…
… et voici une nouvelle frontière franchie. Celle d’un pays qui, un jour d’indépendance, inscrivit la protection de l’environnement dans sa Constitution : le Monténégro.
Que dire.
Impressionnée. Au sens propre et au sens figuré. Ma rétine garde encore l’éclat tranché d’un vert sombre intense, d’un bleu éclatant, et du gris doux de la pierre. Ma mémoire est encore imprégnée de l’indolence qui se dégage des rues de Podgorica, des routes en lacets de la côte, du lac frontalier de Skadar. Impressionnée aussi par des Monténégrins au physique de rugbymen-bûcherons qui se lèvent entre les Croates trapus et méditerranéens et les secs Albanais taillés à la serpe. Pêle-mêle, la gastronomie robuste fondée sur la viande, des choix musicaux et vestimentaires atroces (mais ça, c’est un point commun aux Balkans : de la techno à fond et des talons plus que hauts, mini-jupes et mini-tops de la plus impressionnante vulgarité) et… un calme olympien*.
Trois régions distinctes, l’incroyable côte escarpée plongeant dans les eaux transparentes de l’Adriatique et cachant les Bouches de Kotor, la plaine centrale du pays traversée de rivières opalescentes, et le relief sévère des frontières septentrionales où se cachent gorges et monastères. Au milieu de tout cela, quelques villages pittoresques aux églises accrochées à flanc de montagne, d’anciennes capitales au patrimoine manucuré, et Podgorica qui donne plus le sentiment d’une petite ville de province assoupie que d’une trépidante capitale. Dans le reste du pays ? Personne. Juste la nature préservée.
Il y a bien sûr l’incontournable Kotor : petite cité médiévale mignonnette, réellement touristique et réputée pour ses nuits endiablées en été, sertie de son immense muraille et qui cache un patrimoine acquis au Moyen Âge puis sous la domination vénitienne. Eglises romanes des XII-XIIIè siècles, palais de grandes familles des XVI et XVIIè siècles, lions conquérants et ruelles pavées, le décor est parfait pour flâner et se reposer.
D’autant que tout autour se déploie une des plus belles baies au monde, les Bouches de Kotor. Entrelacs de fjords et de criques, eau turquoise ou bleu sombre, les cyprès qui les bordent et les clochers qui les ponctuent, l’endroit est en effet magnifique. Je me souviens y être arrivée dans l’après-midi, les petits villages baignés de soleil s’égrenaient le long des côtes tarabiscotées et la petite cité médiévale a surgi comme une étape évidente. Pour un délicieux café, pour une soirée agréable, pour une balade le long de la baie… de ces lieux corsetés de tourisme qui font tellement de bien sur la route d’une vadrouille un peu cahoteuse.
Le Monténégro était une traversée cette fois-ci.
Une esquisse sur la route de l’Albanie. J’y ai entrevu des forêts, des forêts, des forêts, la côte et la mer transparente. Les falaises à pic qui se jettent dans l’Adriatique, une ébauche méridionale des paysages des lacs italiens, un peu moins celui de Côme que ceux de Garde ou encore plus le lac Majeur. La rudesse montagnarde et la douceur italienne en un seul paysage.
Il me faudra donc y revenir, explorer plus avant les montagnes, débusquer les fresques et les monastères, aller voir les cascades. Profiter de cette sérénité incroyable qu’offre le Monténégro, entre la bourdonnante Croatie et l’Albanie à la lisière du développement.
Et y trouver la route de Sarajevo puis celle de Belgrade. A moins que je ne furète d’abord vers celle de Skopje…
* Sauf si tu vas à Kotor en plein été : mais après, hein, chacun ses préférences !
Viens, prends ma main et suis-moi dans les Balkans. Je t’emmène en Croatie, et notamment dans la chapelle de Beram. Ou bien en Albanie, jusqu’à Butrint, découvrir la Slovénie et ses couleurs…