Mes élèves, un drame et des mots

[Ce billet n’a pas été simple à écrire. Il rassemble à la fois mes interrogations, celles de mes élèves, ce que j’en comprends et ce que j’en ai tiré comme réflexions. Pas de conseils ici, mon expérience seulement.]

Marche Charlie Hebdo

Place de la République, Marche du 11 Janvier 2015.

Que leur dire…

Le prof, c’est un être humain qui gère de l’humain, et l’histoire de chacun donne une coloration à la manière dont nous dialoguons à chaud avec nos élèves sur des événements tragiques comme ceux survenus en cette semaine de rentrée. J’ai un bagage, et je savais jeudi dernier qu’il allait me falloir compter avec, quand bien même je devais « être prof ».

Mon histoire, c’est la sidération pendant les trois jours qu’ont duré les attentats de Bombay en 2008, qui ont laissé la ville groggy pendant des mois ; ceux aussi de 2011 qui ont tué à quelques centaines de mètres de chez moi. Le fait en tant qu’Occidentale d’être cible potentielle s’est ajouté à mon histoire parisienne et de voyageuse, d’avoir conscience que cela peut sauter n’importe où, n’importe quand. De savoir par mon histoire familiale que cela peut VRAIMENT dériver n’importe quand. J’ai retenu de cela le besoin de se réunir, de se serrer, de parler encore et encore, et d’accepter les regards qui se croisent et s’embuent : l’élan viscéral de se sentir humain, solidaires, de partager la peine et l’angoisse. C’est avec cette idée que je suis entrée dans une salle des profs bouleversée.

Mon histoire, ce sont aussi les cris « Vive Al-Qaeda, vive Ben Laden ! » proférés par des 4è devant les attentats de Madrid au début de ma carrière : colère, indignation, incompréhension, et l’absence de réponse institutionnelle à cela. Mes élèves n’avaient-ils donc pas d’empathie ? de retenue ? étaient-ils tous des militants potentiels de l’intégrisme armé ?

Un peu plus d’expérience m’a appris qu’ils étaient surtout des adolescents ; qui plus est, des ados élevés au pied d’un HLM du Val-d’Oise, enfermés dans un microcosme dont ils savaient déjà pertinemment qu’ils ne sortiraient jamais. Les vacances, c’était avec un sourire éclatant aller voir leur tante à Villiers-le-Bel. Des ados dont l’univers était pour nombre d’entre eux marqué par un non-dit absolu sur l’histoire familiale, le pourquoi de l’émigration (et je le vérifie encore aujourd’hui), si ce n’est « la guerre ». L’enfermement, géographique, corporel, intellectuel, culturel et historique.

Voici les élèves auxquels j’allais m’adresser.

Mes élèves.

Alors eux d’abord

J’ai commencé chacun de mes cours en leur disant : « il s’est passé quelque chose de grave, qui touche de nombreuses personnes et qui touche à plein de choses. Quelqu’un peut raconter ce qui s’est passé ? ». J’ai refusé d’encadrer leur pensée, de recourir au bouclier des programmes : faire rentrer le réel dans des définitions et des cases érudites créées par des adultes pour des adultes. J’ai refusé de partir du principe que j’allais contrer frontalement, du haut de ma position d’adulte et de prof, les éventuels dérapages : quand il faut lutter pied à pied contre des thèses fallacieuses, des idées dangereuses, il faut laisser les ados s’exprimer librement plutôt que de se protéger en réduisant immédiatement leur lecture à « liberté d’expression », « liberté de la presse », « laïcité ». Les grands concepts viendront après, peut-être, selon ce qu’ils diront.

Il s’est avéré que presque tous avaient suivi avec attention le déroulement des événements. Ils avaient retenu les noms, les lieux, les hypothèses déjà avancées par les médias. Ils avaient pour certains une lecture bien arrêtée, oscillant entre le « ouais Charlie Hebdo est allé trop loin mais en même temps ça ne se fait pas de tuer » et le « c’est n’importe quoi, c’est pas des musulmans ça » et « en même temps, hein, la classe d’avoir une kalach !  » . Le travestissement de l’émotion, les mots et les provocations de purs ados. Mais ils étaient en demande de clarification, tout autant que nous.

Et ça, chercher le pourquoi, c’était déjà une victoire.

La disproportion

Dans l’attentat contre Charlie Hebdo, l’inadéquation entre l’insulte et la riposte n’est pas du tout venue à l’esprit de la plupart de mes élèves. Il faut dire que ces derniers se battent jusqu’à casser des nez, avoir la bouche en sang, se faire fracturer un tibia, pour une insulte : pour des mots proférés dans une classe, un couloir ou une cour de récréation. Juste des mots. Réellement du sang, réellement des plâtres. Dans une large proportion, ce sont aussi des élèves qui connaissent les coups comme réponse à des notes scolaires, des paroles, des soucis familiaux. Et quand ils s’intéressent d’eux-mêmes à la géopolitique, c’est uniquement au conflit israélo-palestinien, vu au prisme encore de la disproportion : de pauvres hères dépenaillés et affamés dans les ruines de Gaza face à la mécanique huilée et ultra-puissante d’Israël. La disproportion est constitutive de leur vision du monde, elle est naturelle et fait loi. Je soupçonne même qu’il y ait un peu de Schadenfreude dans l’attitude de certains, si les coups tombent sur quelqu’un d’autre, c’est qu’ils ne tombent pas sur moi.

Alors là, j’ai repris la parole. J’ai comparé, donné des exemples simples. J’ai fait appel à leur sens de l’équité, très éveillé à cet âge-là le plus souvent. Où se trouve la gloire à frapper plus fragile que soi ? Où se trouve l’héroïsme dans la kalachnikov qui anéantit le crayon ?

La compassion variable

Dans leur description des faits connus, leur compassion était quasi nulle il faut bien l’admettre. Tout d’abord parce que Charlie Hebdo ne signifie absolument rien pour eux : par leur âge, leurs centres d’intérêt, leur milieu social, ils ne le lisaient pas, n’en connaissaient pas les dessinateurs et il n’y a aucune raison pour que des gamins nés entre 2000 et 2004 aient eu ce journal entre les mains. Et l’empathie quand on est ado, elle est d’abord pour son nombril, j’en veux pour preuve les hurlements de rire quand un élève tombe de sa chaise. Charlie Hebdo leur évoquait aussi une polémique sur la représentation de Mahomet parce que, uniquement, les médias l’avaient rappelée dès mercredi.

La compassion variable est un trait humain pointé du doigt à chaque catastrophe aérienne ou géologique : l’empathie est créée par la proximité réelle ou supposée avec les victimes, et nous pensons le monde en terme de proximité géographique (ce qui arrivait en Inde m’émouvait encore plus quand j’y vivais), religieuse (les églises brûlées et les chrétiens massacrés dans l’Est de l’Inde ou en Birmanie, avec les musulmans au passage, par les hindous et les bouddhistes touchent profondément des catholiques de mon entourage), ethnique pour certains (cela ne fait pas partie de mes cadres mais je le conçois).

Comme mes élèves ne sont pas moins humains que les autres, leur émotion s’est dévoilée quand ils ont entendus les noms de Ahmed Merabet, de Mustafa Ourrad, quand ils ont vu la couleur de peau et le nom de Clarissa Jean-Philippe. La proximité culturelle, ethnique. Et étrangement, l’âge a fait mouche aussi : ils se sont indignés en prenant conscience que certains des dessinateurs étaient des « papys ». Des papys armés d’un crayon, face à des kalachnikovs tenues par des trentenaires.

« Ah ouais, là, c’est abusé quand même…« 

Il n’y a pas de fumée sans feu

Mais dans un univers fait de sanctions et de coups, lorsqu’il arrive quelque chose c’est qu’on l’a un peu cherché, non ? C’est sans doute l’argument qui revient le plus de la part des élèves, avec en ligne la polémique originelle, les caricatures de Mahomet, et la Une un peu trop fine pour qui veut ne trouver que de l’insulte partout dessinée par Cabu. Je n’ai pas eu besoin de leur projeter quoi que ce soit : apparemment, tous les avaient vues ou faisaient semblant de les connaître. Et de surenchérir sur le fait qu’ils avaient aussi regardé la vidéo où Ahmed Merabet se fait exécuter, ainsi que celles des journalistes régulièrement assassinés par Daesh.

Horreur… ou bien peut-être les rodomontades et roulements de mécanique d’adolescents…

Toujours est-il que le journal l’avait bien cherché, et donc avait mérité la punition. On rejoint là les réflexions qui surgissent souvent pendant l’année témoignant selon moi du besoin de justifier la terreur : si les nazis ont voulu exterminer les Juifs, si « tout le monde » déteste les Juifs, c’est que quelque part… ils ont fait quelque chose pour le mériter. L’enfant comme l’adolescent a besoin d’une explication à l’horreur, et quand bien même la peine est disproportionnée, ils établissent une réciproque immonde mais « logique » : si tu fais quelque chose, tu es puni ; si tu es puni, c’est que tu as fait quelque chose. Alors les dessinateurs de Charlie Hebdo l’avaient nécessairement cherché. Sinon, c’est que le monde ne tourne pas rond…

Que mes élèves n’aient aucune idée de ce que contenait et contient le reste du journal, les caricatures vitriolesques de Le Pen, du pape, de Dieudonné, de Sarkozy, d’imams et de rabbins, de tout le monde en fait n’a aucune importance. Charlie dans leur imaginaire est le journal d’une seule chose, qui aurait touché leur âme et leur conscience, la représentation du Prophète. « Sérieux, ça ne se fait pas, ça, c’est de l’irrespect Madame !  » .

Alors parlons un peu de respect.

L’oukaze du respect

Cette notion, on en a badigeonné mes élèves depuis leur plus tendre enfance. Elle est devenue depuis une vingtaine d’année le quatrième mot à ajouter à la devise de la République, en banlieue pauvre en tout cas : le Respect, ce sera le cadre de pensée qui empêchera un peu la marmite d’exploser. Comme le mot « tolérer » (quel mépris : tolérer, c’est accepter de subir !), le respect a tellement été vidé de sens qu’il s’applique à tout indifféremment : on doit « respecter » les autres, accepter leur couleur de peau tout en cédant la place aux personnes âgées, ne pas cracher par terre et écouter l’opinion des autres, ne pas couper la parole aux professeurs et ne pas insulter les élèves. Ce respect-là, tel qu’il a été enseigné, cela s’appelle la politesse.

La loi elle ne s’occupe pas de politesse, mais ça mes élèves ne le savent pas. Pour eux, Charlie et tout le monde est contraint par la loi d’être poli et précautionneux : ne pas insulter la religion des autres, ne pas moquer les convictions des autres puisqu’il est écrit que « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses  » . Inquiéter, embêter, moquer, respecter : c’est du pareil au même. De plus, la loi de 1905 reconnaissant toutes les religions et leur pratique, comme la pratique de l’Islam implique de ne pas représenter Mahomet il est imposé à tous de ne pas insulter les croyants musulmans en représentant Mahomet… Raccourcis, contre-vérités, mésinterprétations, raisonnements erronés : là, on le sait, il y a du boulot et ce n’est pas avec la portion congrue d’heures de cours que l’histoire-géographie-éducation civique reçoit avec des programmes pantagruéliques qu’on en arrivera à bout.

La relativité des lois

Et puis, il faut revenir à Antigone.

Expliquer encore et encore à des esprits pétris de religieux, et pas seulement d’Islam mais aussi de christianisme évangélique, que la religion est une conviction personnelle, qu’elle n’est pas au-dessus de la loi quand bien même elle importe à notre esprit, notre coeur, nos traditions. Qu’il ne peut pas y avoir blasphème dans un journal français, puisque les dessinateurs n’étaient pas musulmans, qu’ils n’ont pas obligé les musulmans à dessiner des images du Prophète, qu’ils ne les ont pas obligés à les regarder ou à acheter le journal. Et parce que tout simplement, le délit de blasphème n’existe pas en France.

Ils comprennent très bien que chaque pays a ses lois, mais leur inexpérience leur empêche de savoir qu’une personne qui se déplace est soumise aux lois du pays où elle se trouve. Je leur ai raconté la déférence absolue due au roi de Thaïlande et à ses photos quelle que soit notre nationalité, je leur ai dit l’interdiction pour moi, femme, de conduire en Arabie Saoudite alors que j’ai le permis, de me rendre et me déplacer sur le territoire si je ne suis pas accompagnée d’un tuteur, père, frère, mari ou fils, alors que je suis indépendante. Parce que c’est la loi, quand bien même elle offense mes convictions personnelles et éventuellement religieuses. La loi humaine est au-dessus des lois divines. Sauf dans les pays où il est clairement dit que c’est la loi religieuse qui fait loi. Mais ce n’est pas le cas en France. Il y a là une nécessité de hiérarchiser, de séculariser la pensée, avec des élèves qui ont du mal à faire la part des choses.

Expliquer enfin qu’une tradition religieuse ne concerne que les croyants de cette religion, pas les pratiquants d’autres religions ou les non-croyants. Ce qui est évidence pour moi, adulte et athée, ne l’est pas du tout pour eux. Je n’ai pas, habitant avec toi, à exclure le porc de mon assiette si ta religion implique de ne pas en manger : il en va de la politesse que lorsque je cuisine, je te propose un plat sans porc, mais qu’il en va aussi de la politesse que tu ne m’imposes pas de manger sans porc (tiens, ça me rappelle mon billet sur le végétarisme ça…). Tu ne m’imposes pas tes contraintes, je ne t’impose pas les miennes : c’est ça, la politesse, le « respect ».

Compliqué. Il faudra y revenir, encore et encore.

L’art du professeur.

Le « deux poids deux mesures »

Progressivement apparaît en dialoguant avec les élèves un sentiment sous-jacent qui parcourt bien des cours d’histoire. Le sentiment de ne pas être écoutés, de ne pas être entendus surtout.

Evidemment c’est en grande partie lié à cet âge où l’on rit et crie fort dans les rues pour se faire remarquer, l’âge où l’on surjoue l’agressivité en pensant que c’est de la personnalité, l’âge où pour s’affirmer soi on s’affirme avant tout contre tous. Mais il y a aussi, notamment pour mes élèves d’origine algérienne, une mémoire occultée faite de confusions, de non-dits et de sang : bien souvent à l’origine de la migration de leurs parents, et non de leurs grands-parents, la Guerre d’Algérie est un point de cristallisation. Mes élèves confondent en toute candeur la guerre d’indépendance et la guerre civile, en font un récit manichéen…

Mais si vous saviez. La demande pressante, presqu’une supplique, chaque début d’année dès la 6è : « Madame, on parlera de la Guerre d’Algérie cette année ?  » . Si vous saviez le poids mémoriel, le travail énormissime qu’il y a à faire pour rendre droit de cité à une mémoire qui empoisonne ces gamins et nous avec, un désir de vengeance fondé sur rien, un besoin que soit reconnue une souffrance endossée par chaque génération. Pas un mea culpa mais un véritable travail d’historien et de pédagogie pour donner des pistes, un cadre de réflexion, une place réelle dans les mémoires et pas un cours-croupion, qui permettrait à ces élèves et à ces jeunes d’accéder à une reconnaissance après laquelle ils désespèrent.

L’étape suivante ? Comme ces ados ont souvent l’âge émotionnel d’un enfant de 3 ans, pire que de ne pas être écouté, c’est avoir le sentiment que d’autres sont plus écoutés que nous.

Le sentiment d’injustice est alors décuplé.

Se rendre intéressant

La dieudonnisation fonctionnant bien, la question des Juifs et de la Shoah est de temps à autre soulevée par un élève plus provocateur ou plus volubile que les autres. Cela prend la forme du « on parle trop des Juifs et pas assez de « nous »  » , « on peut blaguer sur les Arabes mais pas sur les Juifs » . Si l’on enlève les mots qui heurtent et que l’on écoute le ton, on entend effectivement « moi, moi, moi » .

J’ai au début de ma carrière été désemparée de devoir expliciter ce qui relève de l’empathie, de l’humain, de la finesse, ou peut-être d’une éducation. Mais j’explique. Rire de la mort de 6 millions de personnes, femmes et enfants compris, dans des circonstances d’une cruauté infinie est aussi peu adéquat, drôle et pertinent que de faire de l’humour sur les tortures en Algérie ou les conditions et les conséquences de la traite négrière. Que faire de l’humour, c’est pointer une contradiction (du type : « t’es une fille, t’as pas de shampooing ?« … nan, désolée, c’est pour me détendre un peu…) et la mettre à distance pour faire passer un message, ou détendre l’atmosphère sur un sujet sensible ou douloureux. Voyez le Charlie Hebdo d’aujourd’hui en la matière…

S’ajoute parfois l’argument que si les synagogues et les écoles juives sont protégées, c’est parce qu’ « il n’y en a que pour les Juifs et qu’ils veulent se rendre intéressants » . Il y a l’idée qu’être protégé c’est être faible, ou bien auréolé de prestige : comme une star ou un footballeur, on est quelqu’un d’important. Donc si les Juifs sont protégés… c’est qu’ils sont plus importants que les autres ?

Lutter pied à pied, doucement, ne pas tomber dans le panneau de la confrontation, opposer des faits, des faits, des faits. Rappeler que des Juifs ont été tués à Toulouse, dans une école, récemment et uniquement parce qu’ils étaient juifs. Et que l’HyperCasher n’était pas une épicerie choisie au hasard mais parce que juive et fréquentée par des Juifs. La menace est réelle et concrète. Il y a des morts au bout.

Et puis raisonner un peu par l’absurde. Leur demander s’ils désirent donc que des musulmans soient tués dans un attentat contre une mosquée pour enfin « avoir la chance et le privilège » de vivre une vie surveillée ? D’aller à l’école coranique accompagnés par des policiers ? Leur demander aussi s’ils pensent que les gamins de Peshawar trouvent ça drôle d’avoir gagné le privilège d’aller à l’école protégés…

La spécificité de l’antisémitisme

Mais le plus intéressant dans tout cela, c’est de revenir aux mots.

Une des questions qui hérisse mes élèves, c’est de savoir… pourquoi on a besoin d’un mot différent dans la loi et dans le vocabulaire quotidien pour qualifier la haine des Juifs ? Leur interrogation est sincère et récurrente, parce qu’elle introduit encore cette idée que « pour les Juifs, c’est toujours différent » .

Le racisme est un des autres sujets transversaux de la scolarité de mes élèves, on l’aborde par les programmes, on l’aborde par les projets dès le primaire. Le racisme opère sur des critères d’ethnie, de religion, d’origine géographique etc. Dans leur idée, l’antisémitisme devrait être intégré sous le concept de racisme. Et c’est peut-être ce qui m’a demandé le plus de temps à clarifier pour moi-même… pourquoi le racisme est-il distinct de l’antisémitisme… que recouvre donc cette notion d’antisémitisme…

… rien. Rien de concret. Ce n’est pas une question de pratique religieuse ou de concurrence. Ce n’est pas une question de couleur de peau. Ce n’est pas une question d’origine géographique. Ce n’est rien de physique, de culturel, de politique, ce n’est rien de tout cela. Peut-être la réflexion la plus édifiante à cet égard a été celle d’une élève me disant « Madame, quand on va dans le quartier des Juifs, ils nous regardent bizarrement » .

Voilà. Le rien absolu. Et tout ce qui s’engouffre dedans : les fantasmes et les rumeurs, tout peut avoir un sens puisque de toute manière, l’antisémitisme ne repose sur aucun critère concret. Tout peut donc venir l’alimenter : un peuple différent (rare), l’argent (toujours), la puissance occulte (moins à leur âge), la manipulation (plus). Le fantasme qui perdure depuis les débuts du christianisme, avec ses couches qui s’ajoutent à chaque crise de l’histoire : les rites sanguinaires du Moyen Âge, le critère du sang introduit par les rois espagnols, l’âpreté au gain des grands argentiers du roi et de l’industrie etc.

« Alors Madame, pourquoi leur tape-t-on dessus s’ils n’ont rien fait ? » . Pharmakos, le bouc émissaire, El Fennec me rappelant très justement ce proverbe shadok :

Proverbe Shadok

Alors ?

Un prof est sous le feu nourri de mille questions à la fois. Le dialogue est possible mais le débat serein ne l’est pas tant nous sommes tous face à nos limites quand ce qui nous semble évident, moralement et socialement, est mis en cause. Nous sommes en première ligne d’une lutte pour laquelle nous n’avons que trop peu de moyens, humains et horaires. Pas besoin de textes pétris de bonnes intentions, pas besoin de liens vers des séquences sur la liberté d’expression, pas besoin d’émission sur « comment parler des attentats avec les élèves » : donnez-nous des médecins scolaires, des assistantes sociales, des COP, des assistants d’éducation, des éducateurs, des profs payés et traités correctement. Donnez-nous des heures pour aider à réfléchir, interroger et comprendre le monde dans lequel nos élèves vivent et sont amenés à prendre part. Tout simplement.

Les propos de certains de mes élèves, rares pour les provocateurs, plus nombreux pour les « testeurs », paraissent outranciers ? Ecoutons-les. Que nous disent-ils d’eux, de notre société, de nous ? Ces élèves tâtonnent. Questionnent. Répètent. Provoquent. Essaient d’interpréter à partir des seuls cadres de pensée dont ils disposent. Ce sont des adolescents qui sont en train de se former. A les contrer en ridiculisant leurs vues que nous jugeons étriquées, passéistes et dangereuses, nous perdrons à chaque fois. Ce sont des ados et nous sommes des adultes. Ecoutons-les avant de les qualifier de « graine d’islamistes »…

Note : la véritable marche républicaine commence maintenant. La question de l’Ecole certes, mais de tout le reste aussi. Les services sociaux, le milieu carcéral, la prise en charge psychiatrique : tout cela relève de notre engagement de citoyen. Jusqu’où et comment sommes-nous prêts à nous engager ?

 

 

 

HIIIIIIIIIIIII !!!(1037)Boah...(57)

240 commentaires

  1. Bonjour Chouyo
    Tu es citée dans le bulletin de ma profession je te félicite.
    Vocîle lien
    http://www.lacanquotidien.fr/blog/wp-content/uploads/2015/01/LQ-457.pdf
    Francoise aka ckankonvaou

    HIIIIIIIIIIIII !!!(6)Boah...(1)
  2. Merci pour ce billet réfléchi et empathique (le grand écart). Sur le point de ce qui fait la différence de l'antisémitisme, c'est la culpabilité étatique des nations européennes quant à la Shoah: ça c'est passé sur leur sol, avec l'aval des gouvernements nationaux (certes, sous occupation), et la complicité d'une partie de la population.
    Le mot n'aura plus de sens le jour où un président français pourra parler des bienfaits de Vichy comme il peut évoquer les bienfaits du colonialisme, ou faire un équivalent du discours de Dakar à Tel Aviv.

    Dans la lourde tâche que vous avez à mener (et, qu'à vous lire, je pense que vous mener à bien, autant que faire se peut), il faut aussi lutter avec le fait que nos gouvernants n'hésitent plus, depuis le bruit et l'odeur de Chirac, à utiliser des petites phrases d'appel du pied au soi-disant électorat du Front National à des fins bêtement et bassement électoralistes / politiciennes.
    Quant au respect, "Casse toi pauv' con" a placé la barre assez haut (on a beaucoup plus parlé du coup de boule de Zidane, proportionnellement, comme s'il avait plus de valeur que le premier - si c'est le cas, on peut partir en vacances…).

    Dans ce sentiment d'inégalité que ressentent vos élèves de la "diversité" française, il y a quand même un déséquilibre fort de la parole politique, qui laisse accroire que cette inégalité a l'aval de l'état. Ça mine l'ascenseur social… et ça ne tombe pas non plus dans l'oreille d'un sourd (chanteurs, humoristes, rappeurs reprennent immédiatement ces dérapages pour en faire leur miel, et nos adolescents les écoutent).

    En fait, le monde est inégalitaire (ça dure depuis longtemps), mais le discours égalitaire n'est plus crédible s'il n'est pas suivi d'actes politiques concrets et de mesures palpables. Il sonne creux. Et ça, l'école n'en est non seulement pas responsable, mais elle ne peut être qu'un emplâtre (d'éducation) sur une jambe de bois (médiatique, politique, administrative - il suffit d'aller à la préfecture avec une carte d'identité africaine, maghrébine, ou slave, pour comprendre ce que signifie l'inégalité administrative, et plusieurs de vos élèves font les démarches avec/pour leurs parents).

    Mais contrairement au capitaine du Costa Concordia, vous resterez sans doute jusqu'au bout sur le bateau républicain. Et à lire plusieurs billets ces derniers jours, moi aussi, conscient que la cause est peut-être perdue (vous notez la lueur d'espoir), mais que ne pas la défendre serait perdre encore plus.

    HIIIIIIIIIIIII !!!(27)Boah...(3)
    • Seule remarque: effectivement, l'école est le reflet de la société, et à elle toute seule, n'est pas responsable, mais, si elle était "un peu moins" élitiste, compétitive, et "un peu plus" coopérative, dans son fonctionnement... ???

      HIIIIIIIIIIIII !!!(5)Boah...(2)
  3. Enseignants, éducs et les autres...un site qui aide à penser et à agir.

    Site créé par Dounia Bouzar anthropologue :
    Centre de prévention contre les dérives sectaires liées à l'Islam

    HIIIIIIIIIIIII !!!(8)Boah...(4)
  4. Merci pour ces mots justes. Merci pour ces éclairages du terrain. Cela fait un bien fou. Oui mettons le paquet sur les moyens humains et financiers dans l'éducation et multplier des lieux de parole. Encore merci et bon courage dans votre mission d'enseignant.

    HIIIIIIIIIIIII !!!(37)Boah...(5)
  5. Ce billet est une claque remarquable d'intelligence et de finesse. Merci pour ces mots.

    Et bon courage à vous.

    Un collègue.

    HIIIIIIIIIIIII !!!(31)Boah...(8)
  6. Excellent article ! Bémol : ta réponse concernant l'antisémitisme. Tu oublies de reconnaître que tes élèves ont une perception de la réalité et de la banalité de l'islamophobie en France. Ce qu'ils voulaient te dire, c'est que les musulmans de France ne sont pas suffisamment protégés à cet égard. D'autre part : Charlie Hebdo vire Sinet pour anti-semitisme, et on autorise par la suite des caricatures visant les musulmans. Cela, ils le savent peut-être aussi. Ce n'est qu'un exemple.

    HIIIIIIIIIIIII !!!(42)Boah...(19)
  7. Cet article est intéressant et agréable. Reste que la situation est explosive ou minée si l'on préfère, et qu'entasser 200000 personnes de plus par an en provenance d'Afrique pour l'essentiel compliquera tout jusqu'à la rupture. Sans illusions, votons Front National.

    HIIIIIIIIIIIII !!!(14)Boah...(139)
  8. Je viens de découvrir votre article, et par là-même votre site. J'y suis resté le temps d'une lecture et d'une promenade à travers votre univers. Ce que j'y ai vu ne ressemble à rien d'autre que ce que j'ai déjà visité : de la curiosité, une belle écriture et du dépaysement !

    Par ailleurs, ce dernier billet donne un panorama de réactions sans détour, avec la sensibilité de chacun, pour y peindre une société bien loin des clichés de TF1 et/ou de BFM TV. Et, bien vu de nous rappeler ce proverbe shadock...

    Je reviendrai, promis.

    HIIIIIIIIIIIII !!!(37)Boah...(3)
  9. Mille mercis. Pour l'intelligence, la clarté, la sensibilité, le courage. Une belle humaniste!
    Et l'humour, ne pas oublier l'humour qui, on le sent, frémis sous la plume.
    Qu'ils ont de la chance vos élèves!
    J'ai trouvé en lisant votre texte les mots que je cherchai en vain depuis la semaine dernière. En particulier avec mes ados de 17 et 19 ans, qui tenaient certains de ces propos, liberté d'expression "oui mais" et Et aussi pour mes "grands" bien sensibles à Dieudonné.
    Ah, le paragraphe sur l'oukase du respect et celui sur la relativité des lois! Des bijoux.
    Je crois que vais l'imprimer d'ailleurs et le relire, l'approfondir encore.
    Et la fin, le meilleur presque! Oui, c'est maintenant que la marche commence, par la parole, par l'écoute par le questionnement, encore et encore. Merci pour cette aide très très précieuse. Vraiment.

    HIIIIIIIIIIIII !!!(30)Boah...(5)
  10. Beaucoup de mots justes qui tranchent avec les mots et les comportements de certains collègues lus et vus ici ou là. Une critique quand même: quand, en conclusion, vous évoquez la véritable marche républicaine qui commence maintenant, vous oubliez juste un "petit" détail: 4O ans de dévastation sociale et économique des conditions de vie ( de survie) des classes populaires,résultats de la mise en oeuvre de la contre-révolution néo-libérale. On peut mettre tous les moyens qu'on veut ( et je suis évidemment pour) dans l'école, moyens que vous évoquez, si la politique économique globale ne change pas, nos élèves seront toujours confrontés à la précarité, à l'absence de perspective, au chômage de leurs parents, de leurs proches. La dérive sectaire de centaines de gamins de ce pays est le résultat ultime d'une politique menée depuis des décennies. Et si rien ne change, les événements de 2005 seront de la "gnognote" à côté des insurrections et des révoltes qui se produiront nécessairement. La solution est donc, comme souvent, politique.

    HIIIIIIIIIIIII !!!(13)Boah...(3)
  11. Merci merci merci. Vous avez levé une partie du brouillard qui c'etait formé dans ma tête ces derniers temps.

    Mille fois merci.

    HIIIIIIIIIIIII !!!(5)Boah...(4)
  12. Article cité dans la Une de Médiapart aujourd'hui ("Pour les enseignants, il faut dialoguer, dialoguer et encore dialoguer"|15 janvier 2015 | Par Lucie Delaporte et Rachida El Azzouzi).

    HIIIIIIIIIIIII !!!(6)Boah...(2)
  13. Et si on leur disait la vérité? Que la société n'est pas juste, que l'état les délaisse sans scrupule, que certaines communautés sont plus puissantes que d'autres et sont plus représentées dans les médias et la politique, que la discrimination existe, que des drames humains sont exploités politiquement et financièrement, etc... En gros, si on arrêtait de leur mentir? Si on leur disait qu'ils doivent passer outre ces injustices et se battre et être plus forts et plus intelligents que ceux qui ne veulent pas d'eux...

    HIIIIIIIIIIIII !!!(40)Boah...(5)
  14. Merci pour ce texte....Je l'ai partagé sur FB et il fait un carton....Si cela pouvait semer des graines....

    HIIIIIIIIIIIII !!!(6)Boah...(2)
  15. Un article fort intéressant. Je suis issue de l'immigration pour ne pas dire une ex-immigrée, je ne vis malheureusement plus en France depuis quelques mois (faute de papiers) mais les questionnements de vos élèves sont à mon avis légitimes, non pas parce qu'ils sont issus de l'immigration mais parce que c'est un peu le fléau du siècle et que ce n'est peut être qu'auprès de vous qu'ils pourront avoir des réponses.
    A mon avis, il y a une chose important que je voudrai dire en tant qu'afraicaine du Nord : il faut arrêter de traiter les 5 millions d'africains du Nord en France de "musulmans modérés", la religion est une conviction personnelle, ces 5 millions devraient être traités pareil que les 60 millions de français, le cas échéant si ces 5 millions sont automatiquement musulmans les 60 autres sont automatiquement chrétiens, c'est à partir de cela qu'à mon avis on devrait entamer le débat et ce depuis le plus jeune âge même si pour ces élèves la, vivant dans ces conditions la, ce serait les insulter que de faire illusion au fait qu'il est possible d'être africain du Nord, de parler arabe et d'être non croyant. Ceci dit, votre article est de loin le meilleur et le plus proche de la réalité que tous ceux que j'ai pu lire cette dernière semaine. Bonne continuation et surtout merci pour ce que vous faites avec ces jeunes, ils n'en sont peut être pas conscients aujourd'hui mais ils le seront dans quelques années.

    HIIIIIIIIIIIII !!!(23)Boah...(3)
    • c'est exactement ça!!! de la bienveillance oui de la compréhension oui mais aussi un rappel haut et fort à la citoyenneté, aux valeurs républicaines, et à l'autorité .......

      HIIIIIIIIIIIII !!!(2)Boah...(1)
  16. Je ne suis dinpas seule , enseignante en premiere ligne, à penser ce que vous avez su tres bien écrire. Merci et au plaisir de voys lire à nouveau

    HIIIIIIIIIIIII !!!(1)Boah...(0)
  17. Bonjour et merci pour cette analyse juste ! j'ai été confronté il y a 20 ans de ça au même discourt des jeunes, aux mêmes interrogations. Peu de choses ont changé ! Le travail que vous faites en tant que prof est très important mais si les parents ne vont pas dans ce sens, rien ne changera vraiment. Vos paroles seront oubliées dés qu'ils passeront les portes de l'école. C'est un travail collectif que nous devons accomplir si nous voulons que le monde change. J'ai deux enfants - ma fille 13 ans et mon fils 10 ans. Mon fils a été le premier à me dire <> et il rajoute, lui qui passe des heures à dessiner <> Que lui répondre sur l'instant ? s'engage alors un dialogue, rappel de l'histoire, ... et au final, il repart dans sa chambre, revient avec un " je suis Charlie " imprimé sur une feuille. Je lui demande pourquoi, il me répond avec maturité qu'il admet ne pas comprendre ce que faisait réellement le journal mais qu'il dessinait comme lui alors c'est pour défendre les dessinateurs. Alors on reparle un peu et on évoque les autres Humains tués, parce que c'est cela que nos enfants devront retenir pour l'avenir: <>. Et tout s'embrouille dans sont esprit. Certains sont morts parce qu'ils dessinaient, d'autres parce qu'ils sont juifs et ils ont tué des policiers ? - <>, ses mots ont terminé le dialogue. J'ose espéré que le sentiment de mon fils à cet instant, <> lui restera en mémoire toute sa vie et je m'y emploierai parce que ce sont ces mêmes valeurs que m'ont enseigné mes parents et mes grands-parents: la tolérance, le respect des autres, l'égalité entre tous les êtres humains, sans distinction ! sauf pour toute personne qui commettraient des actes barbares, ça, je mettrai toutes mes forces à le dénoncer auprès de mes enfants.

    HIIIIIIIIIIIII !!!(4)Boah...(3)
  18. Merci beaucoup pour ce texte très explicite. J'enseigne face à des élèves de ans et les ados je ne les connais pas beaucoup. L'article m'éclaire beaucoup sur leur mode de pensée.

    HIIIIIIIIIIIII !!!(1)Boah...(1)
  19. Merci pour ce texte, ces mots et votre travail au quotidien. Je pense n'avoir rien lu d'aussi pertinent depuis les attentats.

    HIIIIIIIIIIIII !!!(1)Boah...(1)
  20. Précieuse analyse qui va chercher les vraies causes des comportements outranciers des ados. Et c'est une fois encore la confirmation de la certitude que l'école à un rôle essentiel à jouer. Cela veut dire qu'il faut élargir la place de l'ecole: pas seulement enseigner mais éduquer. Compléter l'action éducative de familles souvent démunies et dépassées. Il faut alors donner à l'école d'autres moyens, comme vous le soulignez : éducateurs, psychologues, médecins. ..Un travail en équipe, pour une véritable Éducation Nationale républicaine et apprenant la tolérance et l'amour des autres.

    HIIIIIIIIIIIII !!!(6)Boah...(2)
  21. Bravo. La complexité des diversités est très bien exposée dans votre texte. A publier !

    HIIIIIIIIIIIII !!!(1)Boah...(1)
  22. Bof, Dégoulinant de bons sentiments bobos. Que le profs s'occupent d'apprendre aux enfants à lire et à écrire.

    HIIIIIIIIIIIII !!!(4)Boah...(36)
    • en collège, cher Gibi, les enfants n'en sont plus et savent lire et écrire, le programme est censé leur apprendre à être des citoyens, et donc comprendre ce qu'ils lisent et écrivent.
      Quant aux "bons sentiments bobos" je les préfère aux mauvais, d'où qu'ils viennent.^^

      HIIIIIIIIIIIII !!!(3)Boah...(1)
  23. Merci. Après plus de 40 ans d'enseignement, je ne peux que souscrire à ce qui est dit ici avec mesure et lucidité.

    HIIIIIIIIIIIII !!!(3)Boah...(1)
  24. "Les Juifs sont les membres d’un peuple lié à sa propre religion, le judaïsme, et au sens large du terme à une appartenance ethnique et religieuse. L’antisémitisme est le nom donné de nos jours à la discrimination et à l'hostilité manifestées à l'encontre des Juifs en tant que groupe ethnique, religieux ou racial."...pour la différence avec le racisme...nuance compliquée à expliquer j'imagine.

    Je pense que la haine envers les juifs, à laquelle j'assiste tous les jours venant d'ados de mon quartier (alors que je n'entends pas les ados juifs insulter les homos ni les arabes) par ailleurs, c'est aussi envers cet "autre" qui n'est ni black ni beurre ni vraiment blanc, et qui envers et contre tous les coups qu'il a pris et continue de prendre, ne se révolte pas ou ne se venge pas, bosse et continue d'avancer, quel que soit le pays où il se trouve. cette attitude est trop loin de certaines mentalités.

    Je me souviens que petite dans ma classe, j'étais jalouse du meilleur élève. Il se trouve qu'il était juif (salut Jérémie si tu me lis). Je me souviens que ses parents étaient présents, aimants, attentifs (plus attentifs que les miens pouvaient l'être). Je comprends aujourd'hui mieux pourquoi ils l'étaient depuis que je suis mère : on ne peut compter que sur soi même, on est responsables de soi même d'abord, puis des siens. Quelle chance d'avoir des parents qui nous aident à croire en nous, à s'aimer et à penser que le travail, la remise en question, la lecture et l'humour peuvent donner du plaisir, ouvrir une fenêtre...les outils indispensables à une vie en harmonie avec les autres. Les juifs entretiennent une tradition de la transmission, de la lecture des textes et du dialogue qui invitent à la remise en question. C'est sans équivalent dans aucune autre culture, et je crois bien que c'est une des raisons de leur richesse (intellectuelle...avec 25% de prix Nobel pour 0,01% de l'humanité)

    Je ne vais pas me convertir pour autant mais prenons en de la graine.

    Mille mercis pour ce que vous transmettez, pour ce texte. D'ailleurs le feriez vous lire/traduire aux parents de vos élèves?

    L'école de la République, avec des profs comme vous, ce doit être bon d'y être.

    HIIIIIIIIIIIII !!!(10)Boah...(2)
    • Le problème est un peu médiatique, on montre le 1% des juifs qui sont difficilement supportable avec l'affichage trop dédaigneux de leur religion et l'on passe assez sous silence les autres qui sont normaux.
      Ceci dit, on peut difficilement accuser les autres de "racisme" (même si le concept de race est complètement dépassé) quand soit-même on le pratique, je m'explique, contrairement aux autres, il y a les juifs et les autres (cons), Je trouve aberrant leurs coutumes vis à vis du mélange des espèces, ils sont très semblables aux musulmans sous certains aspects. On admet qu'un homme juif marie une non juive, mais il n'est pas question qu'une juive puisse faire de même. Par cette attitude, on peut dire qu'une bonne partie des juifs sont en effet racistes.
      (rassurez vous, cette tendance ne leurs est pas réservée, il y a aussi le milieu qui est de même et combien de familles bien catholiques (ou protestantes, mais dans une moindre mesure), bien nées n'admettent pas les mélanges, voire les nobles pas si nobles dans leur attitudes que ça)

      En plaisanterie, le directeur du Zoo de Bâles, après bien des recherches infructueuses de trouver un gorille male, passe des vacances dans une vallée reculée du Valais germanique. Il voit passer un type à l'allure simiesque et se dit essayons.
      Il lui présente l'affaire et lui promet un bon salaire si il parvient à redonner goût à la vie de la gorille femelle.
      - D'argent point besoin, mais il faut que le petit soit catholique.

      HIIIIIIIIIIIII !!!(1)Boah...(4)
  25. Tombée par hasard sur ce billet partagé sur facebook je n'ai pas pu m'arrêter de le lire. Travaillant dans le médico-social et me rendant chaque jour dans différentes écoles, cet ecrit fait échos à mon quotidien. Nous avons tous un rôle à jouer pour sûr. Jusqu'au dernier mot, merci Chuyo, merci de penser, d'ecrire et de le faire partager.

    HIIIIIIIIIIIII !!!(4)Boah...(0)
  26. Bonjour,
    J'aime bien voir la face cachée des choses et je suis allé visiter un journal qui pose d'autres questions. Les moutons enragés ou quelque chose de ce type au sujet du No 2 de la police en France qui s'est suicidé (selon la version officielle) ou qui a été suicidé selon les théoriciens du complot, parce qu'il aurait trouvé des éléments politiquement incorrects.

    Je vois d'autres parts: les caricatures vitriolesques de Le Pen, du pape, de Dieudonné, de Sarkozy, d’imams et de rabbins...
    Le dernier mot je fais brusquement tilt, je ne suis pas un fanatique de CH, mais le peu que j'ai lu, je n'ai jamais vu de caricatures contre les intégristes juifs. Je me trompe peut-être, mais en brassant un peu tout ceci, il reste des points d'interrogation qui ne s'effacent pas facilement.

    Ce n'est peut-être que des soupçons incorrects, mais je me dis qu'il n'y a pas que les Russes qui savent manipuler, les américains et consort ne sont pas mal non plus

    - Pearl-Harbourg,où l'ouverture des archives a montré que la tête était au courant mais voulait forcer la main au peuple américain à rentrer en guerre. Je ne me plains pas je constate.
    - Kennedy La lumière est loin d'être faire sur ce meurtre et la version présentée officiel semble couvrir ce qu'elle ne devrait pas.
    - Le 11 Novembre, C'est un peu dur à admettre, mais 2 tours contre 2 pays c'est pas mal comme deal pour les marchands de cannons. Après le Vietnam ou ils se sont ridiculisés, l'occasion était trop belle. J'ai toujours de la peine à m'enlever de la tête que Ben Laden n'était pas aux ordres de Bush. (voir apparition lors des élections pour resserrer les rangs.)
    - Dans de nombreux pays de l'Europe de l'Est, de nombreuses organisations américaines, soit disant non gouvernementales sèment la zizanie avec les résultats que l'on connait.

    Il y a beaucoup d'indices, pas de preuves directes (ils sont peut-être pervers, mais pas idiots), c'est de plus en plus difficile de croire les versions officielles et j'ai toujours tendance à me poser la question: A qui profite le crime?
    Pas évident.

    HIIIIIIIIIIIII !!!(3)Boah...(14)
    • Que dire... Quand l'inculture se mêle aux théories du complot...
      C'est aussi ça la démocratie...

      HIIIIIIIIIIIII !!!(8)Boah...(0)
  27. Bravo Chouyos pour l'attitude pédagogique dont vous faites preuve. Et votre billet permet à ceux qui n'ont pas la chance d'être dans vote classe de profiter de votre humanité.

    Je ne m'étendrais pas sur la complexité et les nombreuses raisons pour lesquelles nous en sommes à vivre ce genre de cauchemars. Je me limiterais à deux éléments : les exécutants et les commanditaires.

    Les exécutants (Merah - Coulibaly - les frères Chouaki)sont des êtres faibles et manipulés. Et malheureusement, ils sont le fruit de notre République actuelle dont l'éducation nationale en est un pilier. Depuis environ vingt ans, notre école ne veut plus répondre, faire face à ceux qui ont les plus grandes difficultés, quelles qu'elles soient. Le monde change mais pas l'institution. Toujours le même rapport hiérarchique maître - élève, une même pédagogie baser sur l'apprentissage du savoir, rien que le savoir, ingurgiter sans comprendre, ne pas réfléchir. Une pédagogie de masse qui fabrique une élite, une masse laborieuse et une dernière laissée pour compte qui doit lutter quotidiennement pour vivre. Et c'est cette dernière qui constitue le vivier de ceux qui sont prêts à donner leur vie pour enfin "exister", donner un sens à leur vie par la mort. Certes, ce n'est pas la seule institution fautive mais elle est une des premières, en parallèle avec la cellule familiale, qui constitue le quotidien de l'enfant et participe à son être futur. Elle doit faire sa révolution
    Les commanditaires : ce sont d'abord et avant tout des criminels qui utilisent la religion pour manipuler les êtres humains et justifier leurs actes barbares. C'est une guerre qu'ils mènent mais ce n'est pas une guerre de religion. Je ne m'étendrais pas sur ce sujet ni sur les responsabilités des uns et des autres. Mais il est important de ne pas l'oublier. Ce sont des symboles que l'on manipule. Ce ne sont pas des musulmans qui ont tués des juifs. Ce sont des êtres malheureux et manipulés, des soldats d'une armée internationale dont le seul but est de conquérir des territoires et les conserver pour avoir une part du gâteau des différents trafics criminels et du pouvoir. Peu importe pour eux le sort des uns et des autres dans le monde. ils nourrissent la haine entre les hommes seulement pour leur but personnel.

    Il faut refuser la focalisation sur le tout sécuritaire et l'amalgame. Il est grand temps que notre société se regarde dans les yeux et discute, échange et agisse. Nous avons chacun une part de responsabilité (passé, présente et futur). Elle doit être définie, discutée, partagée et nourrir un futur vivre ensemble plus harmonieux. Notre société est métisse et riche de ses différences. Elle doit le rester dans une acceptation de notre république laïque et respectueuse de toutes les religions, dans notre pays. Et si d'autres nations et peuples partagent également ses valeurs, nous devons être à leur côté.

    Je vous souhaite une belle continuation dans votre métier et je suis convaincu que vous serez parmi ceux qui contribueront à ce que notre école forme avant tout des citoyens du monde doué de savoir faire, de savoir être et de savoir vivre avant que d'être des enfants de savoir. Des êtres libres!

    HIIIIIIIIIIIII !!!(1)Boah...(1)
  28. Peut-être introduire aussi qu'obliger des gens à manger Halal alors qu'ils ne sont pas musulmans peut heurter leur sensibilité.
    Si si car on oublie que ce rite d'abattage (comme celui du casher) est contraire au lois européennes et est obtenu par dérogation par intérêt économique, lobbying industriel sous couverture de religieux bien contents.

    Mais sinon, beau billet et belle expérience de cours, au raisonnement construit... qu'il faudrait recommencer des jours et des jours, sans quoi il n'en subsisterait que quelques 10% encore 1h après.

    HIIIIIIIIIIIII !!!(3)Boah...(1)
  29. Beau billet.
    Mais un rien, un rien unilatéral à mon avis.
    Ces élèves n'expriment ils aucune part de vérité ?
    Et le prof n' a t il pas pas à leur faire comprendre qu'ils peuvent agir pour améliorer la société, leur société ?

    HIIIIIIIIIIIII !!!(4)Boah...(1)
  30. Merci pour ce témoignage et pour ce texte : bravo pour l'analyse et pour la patience. Tant le chemin est étroit...
    J'ajouterais deux points qui ajoutent au trouble et la difficulté des choses :
    1. on est en plein dans la société de l'information et de la communication. Les échanges sur internet (et notamment sur les réseaux sociaux) sont les principales, voire uniques, sources d'information pour ces élèves. Sans filtre, sans vérification, sans analyse. Une sous-culture de masse, hors de tout contrôle. Et avec quelquefois des sites manipulateurs et riches...
    2. le conflit entre les Israéliens et les Palestiniens offre à ces élèves une cause toute trouvée pour appuyer leurs propos : les deux poids deux mesures. Et sur ce plan, difficile de leur donner tort.
    Sans bien sûr évoquer le vrai problème : l'espoir individuel de s'en sortir (économiquement, socialement). Sur ce plan, ces jeunes ne se font pas beaucoup d'illusions.
    Bref, je suis un peu désespéré (mais je continue comme vous à faire ce que je peux, une goutte dans l'océan) : tant que l'école ne redevient pas un vrai ascenseur social avec des vrais perspectives pour la plupart de ces élèves, il me semble difficile de les faire adhérer à un système de valeurs commun...

    HIIIIIIIIIIIII !!!(7)Boah...(2)
  31. Bonjour,

    J'ai lu tout votre texte mais je n'ai pas eu le temps de lire tous les commentaires déjà postés et je crains de ne rien dire de nouveau.
    Mais peu importe, simplement faire nombre derrière la peine que vous vous donnez de donner à voir, à sentir, à penser ce qui se passe maintenant dans les écoles, avec autant de recul (quasi planétaire) et d'empathie..

    ---

    Ce matin encore, juste par exemple, je me suis demandé, comme à chaque fois, comment les autres devaient recevoir l'expression : "la lutte contre le racisme et l'antisémitisme". Je me suis demandé si cette phrase était déjà trop longue ou bien pas assez. C'est vrai que parler de "race juive" résonne vraiment si mal. Mais que faire maintenant pour que tout le monde se sente traité sur un pied d'égalité..

    HIIIIIIIIIIIII !!!(2)Boah...(0)
  32. Très bon article, de la finesse et une puissante analyse. Vous êtes citée par Aboudjaffar / Jacques Raillane sur son Twitter.
    Bon courage pour la suite,

    Un ancien acteur de la lutte anti-terroriste.

    HIIIIIIIIIIIII !!!(6)Boah...(0)
  33. POUR VOTRE INFO, voilà le "débat" que je viens d'avoir avec une personne dite éduqué à propos de votre texte.

    Il m'a fallu du temps pour écrire ce billet qui touche au coeur même de mon métier, par-delà l'émotion mais en comptant aussi avec elle. La suite...
    CHOUYOSWORLD.COM
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    Gitelman Yitzhak C'est un texte assez ignoble qui sous tend la justification du pire ...à savoir la destruction de l'autre pour ce qu'il est ...l'autre...limite délictueux.
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    Patrice Barrat Gitelman, je ne suis, encore une fois, pas d'accord avec vous (ou plutôt le contraire, d'ailleurs). Ce texte ne sous-tend pas du tout ce que vous dîtes. Il essaie simplement de comprendre comment des ados peuvent en arriver à parler comme ils le font, ...Voir plus
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    Gitelman Yitzhak Ou voyez vous un problème religieux ... C'est absurde ce que vous écrivez ....il s'agit d'humain , rien d'autre . Cela étant dit , ce texte est à la limite délictueux et je ne vois rien dans ce texte ou ce prof se met en rupture avec cette pensée quasi...Voir plus
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    Patrice Barrat Alors, d'accord, quelle serait votre approche pour régler les problèmes existants?
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    Gitelman Yitzhak Inculquer si besoin à coup de pompes dans le fion , ce que signifie être un citoyen français et cesser de se référer à des origines soit religieuses soit ethniques ....ce que vous avez soigneusement oublie de faire notamment en Bosnie en soutenant les appartenances ethno religieuses des uns et des autres au lieu de soutenir la citoyenneté yougoslave...inter alia....
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    Patrice Barrat Gitelman, vous commencez à dire vraiment n'importe quoi, à prêter aux autres ce qui vous arrange pour continuer à penser comme vous le faîtes. Jamais, au grand jamais, je n'ai soutenu les "appartenances ethno religieuses" en Bosnie. J'ai soutenu l'idée...Voir plus
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    Patrice Barrat Enfin, je vous avoue aimer la discussion, le dialogue et le débat. Mais avec vous, cela semble peine perdu. Vous "caricaturez" (dans le mauvais sens du terme) les positions de l'autre, vous dites parfois absolument n'importe quoi sur l'histoire de l'au...Voir plus
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    Gitelman Yitzhak Nous avons eu de longues conversations à Sarajevo et à Paris du côté du boulevard des italiens ou vous prétendiez le contraire ....il est curieux que vous ne vous en souveniez pas ? Quant à cette professeur, de l'ecole laïque , publique , obligatoire et gratuite , en relisant ce texte , je la trouve démissionnaire de son rôle de magister. My opinion.
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    Patrice Barrat Vous dites n'importe quoi. C'est affligeant d'en arriver là. Je n'ai jamais eu d'autre opinion sur la Bosnie. Mes écrits et mes films en témoignent.
    À l’instant · J’aime

    HIIIIIIIIIIIII !!!(0)Boah...(0)
  34. Enseignant reconverti, j'ai lu plusieurs billets ces jours derniers sur comment aborder les récents attentats face aux élèves (avec en tête, la question, restée sans réponse, de savoir ce que j'aurais fait, moi...). Merci de nous avoir fait partager votre expérience et votre réflexion, qui sont passionnantes. Bravo, et bonne continuation.

    HIIIIIIIIIIIII !!!(0)Boah...(0)
  35. A la suite de ces événements,je me posais diverses questions sur notre jeunesse et comment elle voyait ce monde....grâce à vous ,j'ai mes réponses. Merci beaucoup pour cet article

    HIIIIIIIIIIIII !!!(1)Boah...(0)
  36. Texte très intéressant. Le plus censé que j'ai lu sur le sujet.
    En tout cas, quel dur métier que celui d'enseignant. J'ai même l'impression que la société demande beaucoup, voire beaucoup trop pour quasiment aucune reconnaissance à toi et tes collègues.

    HIIIIIIIIIIIII !!!(0)Boah...(0)
  37. Un texte paradoxal: à la fois effrayant et qui génère un certain optimisme. On mesure bien la distance effarante entre le "cadre de pensée" moyen de la société et celui de vos élèves, qui trouve ses racines dans un environnement que nous sommes finalement peu à pouvoir bien comprendre et analyser... Vous vous en sortez ici remarquablement bien et je vous en félicite. Je reste cependant optimiste car vous montrez très bien qu'il existe une solution à cette incompréhension: l'Education (je capitalise exprès). Il est entendu qu'avoir trouvé une solution de dissipe pas le problème. Encore faut-il l'appliquer. Mais savoir qu'elle existe est déjà un sacré réconfort pour ma part...

    HIIIIIIIIIIIII !!!(0)Boah...(0)
  38. Comment peuvent-ils avoir de la compassion juste quand ils ont entendus les noms de Ahmed Merabet, de Mustafa Ourrad?

    Si c'est pas racisme ça!

    HIIIIIIIIIIIII !!!(1)Boah...(0)

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