Tagorephilie voire tagorisme (une vraie religion…) généralisée à Shantiniketan :
même dans la « Refreshment room » de la gare…
Un moment étrange, poussiéreux et barbelé.
La Demeure de la Paix ou Shantiniketan, un ashram devenu université fondé par Rabîndranâth Tagore, le grand poète et intellectuel multitalent bengali. On le précise d’ailleurs, car Bengali cela veut dire Indien mais bien plus que ça tant la tradition intellectuelle et culturelle qui a rayonné depuis Calcutta est spécifique.
Il arrive parfois dans une vadrouille ce genre de moment, où l’on ne parvient pas à se connecter au lieu. La saison n’est pas la meilleure, il fait très chaud et très sec, je ne suis pas en résidence dans cette université, moyen sans doute d’apprécier pleinement ce lieu en assistant à des cours, en partageant le quotidien estudiantin. Mais, malgré tout, pourquoi pas ?
Quelques heures de bus et de train au travers du Bengale occidental, des gares routières inexistantes et un bus entier mis à contribution, une étape improbable à Sainthia au milieu de nulle part, et cette course folle sur une planche tirée par un vélo, trois sacs à dos, trois Occidentales échevelées mais hilares traversant sur les chapeaux de roue cette petite ville qui n’en avait sans doute pas vu depuis… au moins ça. Les journaux locaux ont sans doute parlé d’hallucination collective.
Mais où sont les caméras de sécurité ?
Et Shantiniketan enfin. Poussière, chaleur, et des terrains plats devenus presque vagues où les bâtiments cubiques sans charme aucun sont protégés de clôtures grillagées et de barbelés. Quelques étudiants en goguette, certains drapés de jaune, des sculptures de Ramkinkar Baiz au milieu des feuilles mortes.
L’esprit du lieu, je ne l’ai pas senti. Malgré le délicieux temple-pavillon où le bois blanc et les vitraux alternent, malgré les « salles de cours » sous les arbres : photos interdites, pas d’entrée possible, droit d’entrée, la demeure où le poète a vécu entourée de grillages et gardée.
Inaccessible. Interdit. Division de l’espace et division des gens. Incompréhensible en ce lieu.
Une autre fois peut-être.
Les salles de cours sont extérieure, dessinées par un muret au sol.
Un siège surélevé pour le professeur, un arbre pour l’ombre. Et la connaissance ?
(A suivre : Bénarès.)
( Etapes précédentes : Murshidabad, intemporel ; Gaur, deux kilomètres ; Pandua, recyclage.)
J'aime bien la lecture de Tagore, même si je ne suis pas persuadée de tout bien saisir... Tu crois que pour ressentir la profondeur des lieux il faudrait autre chose ? le bon guide, la bonne disposition d'esprit ?
@ Océane : imagine-toi que je n'ai jamais lu une seule oeuvre de Tagore, ça craint. Surtout que j'ai accueilli ici une amie spécialiste de cet auteur...
Je pense surtout qu'il faudrait une justification intellectuelle pour apprécier le lieu : assister à des cours, échanger avec les étudiants et les professeurs, réfléchir sur l'oeuvre intellectuelle et concrète de Tagore...
Je vais suivre les traces d'Océane et tenter la lecture de Tagore, mais je ne te promet rien 😉
@ Faustine : il faudrait que je m'y mette également !
Très poétique la double clôture façon Guantanamo !!
@ M1 : tu as vu ça, c'est fou non ?!?